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La Mère

Entretiens 1953

1er avril 1953


"L'ambition a été la perte de bien des yogi. Ce ver rongeur peut se dissimuler longtemps. Beaucoup de gens partent sur le sentier sans même se rendre compte de sa présence. Mais dès qu'ils obtiennent quelques pouvoirs, l'ambition se lève en eux, d'autant plus violemment qu'elle ne s'était pas fait jour dès le commencement."
(Entretiens 1929, 14 avril)


Qu'est-ce que tu appelles un "ver rongeur" ?


C'est une image, comme d'une belle mangue, si belle du dehors, et quand on l'ouvre, il y a un parasite dedans. C'est parce que la mouche a déposé un oeuf avant que le fruit ne se forme. Dehors, il n'y a aucune trace. Tout a l'air candide, désintéressé. Mais dedans, tout au fond, il y a une grande ambition, le désir d'avoir une position exceptionnelle, d'être respecté de tout le monde ... c'est-à-dire l'ego. C'est le ver rongeur, il se tient bien tranquille, mais il est là. Quand le pouvoir vient, au lieu de se rendre compte que l'on n'est rien, que l'on n'a aucun mérite et que tout ce que l'on a à faire est de rester aussi passif que possible, on se trompe soi-même, on sent le besoin que les autres s'en aperçoivent aussi ! C'est cela que j'appelle le ver rongeur. Cela mange tout ce qui est dedans et ça laisse l'apparence intacte.

Tu dis qu'il faut établir une "homogénéité dans l'être" ?

Tu ne sais pas ce que c'est qu'une chose homogène, faite de parties toutes semblables ? Cela veut dire que tout l'être doit être sous la même influence, même conscience, même tendance, même volonté. Nous sommes formés de toutes sortes de morceaux différents. Ils sont actifs l'un après l'autre. Suivant le morceau qui est actif, on est une tout autre personne, on devient presque une autre personnalité. Par exemple, on avait d'abord une aspiration, on avait l'impression que tout n'existait que pour le Divin, puis quelque chose arrive, quelqu'un vient, on a quelque chose à faire, et tout s'en va. On essaye de se rappeler son expérience, il ne reste même pas le souvenir de l'expérience. On est complètement sous une autre influence, on se demande comment cela a pu arriver. Il y a des exemples de double, triple, quadruple personnalités, absolument inconscientes d'elles-mêmes ... Mais ce n'est pas de cela que je parle; je parle de quelque chose qui vous est arrivé à tous : on a eu une expérience, et pendant quelque temps on a senti, compris, que cette expérience était la seule chose importante, qui ait une valeur absolue - une demi-heure après, vous essayez de vous en rappeler, c'est comme une fumée qui s'échappe. L'expérience a disparu. Et pourtant, une demi-heure avant elle était là et si forte ... C'est que l'on est fait de toutes sortes de choses différentes. Le corps est comme un sac avec des cailloux et des perles tout mélangés, et c'est seulement le sac qui réunit tout cela. Ce n'est pas une conscience homogène, uniforme, mais hétérogène.
Vous pouvez être une personne différente à différents moments de votre vie. je connais des gens qui prenaient des décisions, qui avaient une volonté, qui savaient ce qu'ils voulaient et s'apprêtaient à le faire.
Puis il y avait un petit renversement dans l'être; une autre partie venait à la place et abîmait tout le travail en dix minutes. Ce que l'on avait fait en deux mois, tout est défait. Quand le premier revient, il est consterné, il dit : "Comment !…" Alors il faut recommencer tout le travail, lentement. Donc il est évident qu'il est très important de prendre conscience de l'être psychique, il faut avoir comme un poteau-indicateur, ou un miroir où toutes les choses viennent se mirer et se montrer telles qu'elles sont vraiment. Et alors, suivant ce qu'elles sont, on les met à telle place ou à telle autre; on commence à expliquer, on organise. Cela prend du temps. La même partie revient trois ou quatre fois et chaque partie qui arrive dit : "Mets-moi à la première place; ce que les autres font n'a pas d'importance, cela n'a aucune importance, c'est moi qui déciderai, parce que je suis la plus importante." Je suis sûre que si vous vous regardez, vous verrez qu'il n'y en a pas un parmi vous qui n'ait eu cette expérience. Vous voulez être conscients, avoir de la bonne volonté, vous avez compris, votre aspiration brille - tout est brillant, illuminé - mais tout d'un coup quelque chose arrive, une conversation inutile, une lecture malencontreuse, et cela tourne tout. Alors on se dit que c'était une illusion dans laquelle on vivait, que toutes les choses étaient vues sous un certain angle.
C'est la vie. On se casse le nez à la première occasion. On se dit : "Oh ! on ne peut pas être toujours si sérieux", et quand l'autre revient, une autre fois, on se repent amèrement : "J'étais fou, j'ai perdu mon temps, maintenant il faut que je recommence ..." Quelquefois, il y a une partie qui est de mauvaise humeur, révoltée, pleine de soucis, et une autre partie qui est progressive, pleine de soumission. Tout cela, l'une après l'autre.
Il n'y a qu'un remède : il faut que ce soit toujours là, le poteau-indicateur, un miroir bien planté dans ses sentiments, dans ses impulsions, dans toutes ses sensations. On les voit dans ce miroir. Il y en a qui ne sont pas très belles ni agréables à regarder; il y en a d'autres qui sont belles, agréables et qui doivent être gardées. On fait cela cent fois par jour s'il le faut. Et c'est très amusant. On fait comme un grand cercle autour du miroir psychique, et on arrange tous les éléments autour. S'il y a quelque chose qui ne va pas, cela fait comme une ombre grise sur le miroir : c'est un élément à déplacer, à organiser. Il faut lui parler, lui faire comprendre, il faut sortir de cette obscurité. Si vous faites cela, vous ne vous ennuyez jamais. Quand les gens ne sont pas gentils, quand on a un rhume de cerveau, quand on ne sait pas ses leçons, et ainsi de suite, on commence à regarder dans ce miroir. C'est très intéressant, on voit le ver rongeur. "Je croyais que j'étais sincère !" - pas du tout.
Pas une chose n'arrive dans la vie qui ne soit intéressante. Ce miroir est très, très bien fait. Faites cela pendant deux ans, trois ans, quatre ans - il faut le faire quelquefois pendant vingt ans. Puis au bout de quelques années, regardez comme cela, tournez votre regard sur ce que vous étiez trois ans auparavant "Comme je suis changé ! ... J'étais comme cela ? ..." C'est très amusant. "Je pouvais parler comme cela ? Je pouvais dire comme cela, penser comme cela? ... Mais j'étais très bête ! Comme j'ai changé !"
C'est très amusant, non ?


La Mère

"Entretiens 1953" (pages 10-13)

publié par Sri Aurobindo Ashram - Pondichéry
diffusé par SABDA

Entretien précédent: 25 mars 1953
Entretien suivant: 8 avril 1953


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