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Sri Aurobindo

La Mère des Rêves

Original anglais: The Mother of Dreams

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Mère a commenté ce poème le 25 décembre 1950

Déesse suprême, Mère du Rêve, quand tu te tiens à tes portes d'ivoire,
quels sont donc ceux qui en bas vont vers les hommes dans tes visions qui s'attroupent, groupe sur groupe, en descendant la pente de la voie des ombres?
Rêve après rêve, ils s'illuminent en éclair ayant encore autour d'eux la flamme des étoiles;
des fantômes à ton côté flottent dans une obscurité où dansent les feux follets,
scintillent et clignent les étoiles et le météore errant étincelle;
il y a des voix qui crient à leurs proches qui répliquent; voix douces, au coeur elles frappent et ravissent l'âme à l'écoute.

Que sont alors ces contrées et ces plages dorées et ces mers plus radieuses que ne peut imaginer la terre ?
Quels sont ceux qui cheminent au long des vagues pourpres courant vers la grève bordée de falaises de ton rivage de jaspe sous des cieux où couve le mystère,
drapés dans un clair de lune qui n'est point de notre nuit ou baignés dans un soleil qui n'est point du jour ?
Et ceux-là qui arrivent roulant tes océans avec des voiles aux cordages non-faits de main d'homme et que pousse un vent non-terrestre ?
Pourquoi s'unissent-ils dans une mystique ligne avec ceux des plages joignant les mains en d'étranges et majestueuses danses?

Toi, en haut des airs, une flamme à la chevelure, observant le tournoiement de tes merveilles,
tu maintiens la nuit sous ta loi antique, Mère divine, hyacinthine, par une ceinture de beauté défendue.
Munie d'une épée de feu, attirant le désir, tu gardes ton sombre royaume,
dans une douceur stellaire, avec la lune à tes pieds, tantôt cachée tantôt vue entre les nuages parmi la ténèbre et la traînée de tes tresses.
A ceux-là seuls qu'élut ta fantaisie, Ô toi au coeur libre, il est donné de voir ta magie et de sentir tes caresses.

Ouvre la grille où tes enfants attendent dans leur monde d'une beauté inobscurcie.
Haut-trônant sur un nuage, victorieux et fier, j'ai aperçu Maghavan à cheval quand il est suivi des armées du vent;
j'ai reçu du ciel mets à déguster et fruits de saveur immortelle;
j'ai bu le vin des royaumes divins et ouï le change de la musique étrange d'une lyre que nos mains ne peuvent maîtriser;
les portes se sont grand-ouvertes sur les salles de fête où résident les Dieux et les Apsaras dansent en leurs rondes de plus en plus rapides.

Car tu es celle que nous pouvons voir la première quand nous dépassons les bornes du mortel;
là aux portails des états du ciel tu as planté ta baguette enchantée oscillant au-dessus de la tête du Yogi.
De toi viennent le rêve et les fantômes qui paraissent et les lumières fugitives qui nous abusent;
à toi est l'ombre où les visions se forment; par tes mains précipitées des célestes contrées arrivent les âmes qui se réjouissent à jamais.
Dans tes mondes-du-rêve nous passons ou regardons en ton miroir magique, puis au-delà de toi gravissons hors de l'Espace et du Temps vers le pic de la divine tentative.

1908-1909
(dans la prison d'Alipour)

Sri Aurobindo

Référence: N° 2 in "Les poèmes de Sri Aurobindo" (édition bilingue - traduction de G.)
publié par Sri Aurobindo Ashram - Pondichéry
diffusion par SABDA


Mère a commenté ce poème le 25 décembre 1950

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